Oui bien sûr !
J’ai commencé mon parcours à 16 ans par une école de microtechnique à Paris. L’aspect technique m’a plu, mais l’univers scolaire, un peu moins.
J’ai été orienté en fin de première année vers l’école d’horlogerie Pierre Girard et la passion est tout de suite née.
A moi qui n’avais pas connu de satisfaction dans mon parcours d’étudiant, les résultats sont apparus rapidement, redoublant ma motivation et mon enthousiasme.
J’y ai appris la discipline, grâce notamment à certains enseignants que l’on pourrait qualifier « de la vieille école » mais qui ont néanmoins su apprécier mon caractère indépendant.
Les quatre années qui ont suivi ont été très remplies. D’une part, mon apprentissage en horlogerie et, d’autre part, des stages et emplois dans des laboratoires de tirage photographique où j’ai acquis des connaissances dans les produits chimiques.
J’ai alors grandement développé mes capacités de travail et de concentration.
C’est aussi à cette époque, mais c’est une autre histoire, que j’ai mis le pied dans l’univers du son haute-fidélité de haut de gamme, domaine où l’on associe technologie moderne et respect de la tradition.
Avez-vous immédiatement débuté votre parcours professionnel ?
En fait non. J’ai réuni mes économies et suis parti une année visiter l’Asie, continent qui m’attirait fortement pour son rapport au temps, à la tradition et au sens de la perfection qui en découle. Je conserve un réel attachement pour cette région du monde où je continue fréquemment de voyager.
Pour quelle raison êtes-vous rentré ?
Eh bien, prosaïquement, parce qu’arrivé au bout de mes économies, je n’envisageais pas de travailler ailleurs que dans l’horlogerie, et à Paris.
Engagé au service après-vente des établissements Huguet, j’ai également exercé au stand de l’Artisan du Bon Marché. C’est là que j’ai connu mon ami Vincent Daveau, qui m’a fait profiter de son réseau dans le milieu des horlogers. Ainsi, je n’ai pas tardé à me voir confier mes premiers travaux de restauration sur de l’horlogerie ancienne ou « vintage ».
Sur quels types de pièces travailliez-vous alors ?
J’ai eu la chance de travailler sur de nombreuses marques parmi les plus prestigieuses de l’horlogerie pour des clients exigeants et connaisseurs. Cette période a été pour moi très formatrice car il n’y a pas de place pour l’à-peu-près lorsque l’on travaille sur une Jaeger-LeCoultre ou sur une Patek Philippe à complication. En fait, cela étant vrai pour toute pièce d’horlogerie, j’ai conservé et j’applique pour tous les travaux que je mène aujourd’hui la méthodologie de travail que j’ai acquise à cette époque.
Qu’êtes-vous venu présenter au salon Les Montres ?
Par l’intermédiaire de Vincent Daveau, M. Jean Lassaussois, dans l’esprit qui le caractérise, m’a invité à présenter mes créations au salon.
A force de faire, refaire, à l’ancienne, la plupart des pièces d’un mécanisme, de chercher à comprendre et à appliquer les méthodes dans la tradition horlogère, j’ai pu réaliser mon objectif depuis la sortie de l’école : la création de mes propres modèles.
Ma démarche vient également de l’idée que je me fais de mon métier, de l’horlogerie et notamment de l’horlogerie parisienne. Paris occupe une place majeure dans l’histoire de la pendulerie et il me paraît important de défendre ce secteur un peu délaissé me semble-t-il, même si on y rencontre de grands noms.
Pour ma part, je réalise des pièces visant à adapter la pendulerie au marché actuel.
Et ce sont donc certaines de ces pièces qui sont exposées sur ce salon. Pouvez-vous nous en présenter quelques-unes ?
J’ai choisi de montrer mes pendules, un projet que je développe depuis plusieurs années pour aboutir aux proportions, à l’esthétique, à la finition et à la qualité technique que je recherche.
J’ai opté majoritairement pour un système mécanique que je réalise à partir d’une ébauche de mouvement de Paris que je retravaille presque entièrement, depuis les traitements de surface jusqu’à la réalisation du balancier guidé.
Pour les cadrans, j’ai opéré comme le faisaient toutes les grandes manufactures de la première moitié du XXe siècle, par gravure à l’acide, comme sur ce modèle gainé de galuchat.
D’autres cadrans, qui sortent de la tradition horlogère, ont nécessité un temps de recherche un peu plus long. Par exemple, sur cet exemplaire, j’ai cherché un résultat d’inclusion dans le cadran qui me paraisse techniquement et esthétiquement équilibré.
Avez-vous d’autres projets en cours ?
Beaucoup, bien sûr !
Entre autres, la montre que je porte au poignet et dont j’ai breveté et réalisé le cadran en galuchat , un projet de pendule électromécanique, une pendule à heure sautante que je fabrique actuellement à la demande d’un client.
Enfin, comme tous les horlogers, j’ai des rêves et je travaille à la conception d’un échappement tout à fait nouveau…
Laurent Graire et Emmanuel (votre reporter du jour)
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