Pendant des décennies, Rolex a cultivé un mystère savamment entretenu autour de son fonctionnement interne, faisant de sa discrétion une signature aussi marquante que ses montres elles-mêmes. Mais aujourd’hui, les temps changent, et la maison genevoise sort de son mutisme sur un sujet d’envergure : la durabilité. Pour la première fois, elle a choisi de rendre public un rapport autrefois strictement réservé à l’interne, détaillant en 118 pages son approche des enjeux environnementaux et sociaux. Un changement de cap qui marque une (r)évolution dans la communication d’une marque légendaire, voire mythique, bien décidée à inscrire ses engagements dans la durée.

Un rapport inédit, une transparence nouvelle
Si Rolex reste peu loquace lorsqu’il s’agit de ses chiffres de vente – qui, selon les estimations, dépassent aujourd’hui les 10 milliards de francs suisses –, elle a néanmoins choisi de s’exprimer ouvertement sur ses ambitions en matière de durabilité. Pourquoi maintenant ? Parce que les attentes des consommateurs évoluent, et qu’au sein même de l’industrie du luxe, la transparence devient un critère incontournable.

Dès 2020, la marque a multiplié les initiatives en ce sens : le lancement du site www.rolex.org, l’initiative Perpetual Planet, et désormais, un rapport qui détaille les actions concrètes mises en place pour minimiser son impact.
Une approche fondée sur l’analyse du cycle de vie
Dans cette quête de durabilité, Rolex a mené une analyse approfondie du cycle de vie de ses produits. L’objectif est simple : mesurer, comprendre et réduire. Chaque matériau, chaque procédé et chaque service impliqué dans la production des montres a été passé au crible afin d’identifier les leviers d’amélioration.
Ce travail d’optimisation s’est notamment traduit par une refonte du système de récupération de l’or, qui joue un rôle clé dans l’empreinte carbone de la marque. En 2023, 70 % de l’or utilisé par Rolex provenait de sources circulaires industrielles, soit des déchets issus de sa propre production. Une démarche unique dans l’horlogerie, renforcée par la présence d’une fonderie interne, permettant un contrôle total sur l’approvisionnement et le recyclage des matériaux précieux.
Mais la marque ne s’arrête pas là. Elle explore de nouvelles solutions pour réduire son empreinte écologique, notamment à travers le remplacement des matériaux pétrosourcés par des polymères biosourcés et l’optimisation des processus de fabrication en circuit court.
L’éco-design, un nouvel enjeu stratégique
L’horlogerie de luxe n’échappe pas à la tendance du design responsable, et Rolex en a fait un axe central de son évolution. Dès 2020, l’entreprise a lancé un projet visant à repenser l’écrin dans lequel sont livrées ses montres.
Résultat ? Une boîte fabriquée à 45 % en bois, combinée à 31 % de carton et cellulose moulée, réduisant de 92 % l’utilisation de plastique pétrosourcé. Cet effort se traduit par une baisse annuelle de 500 tonnes de plastique et une réduction de moitié des émissions de gaz à effet de serre liées à la production de ces écrins.
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Dans la même optique, Rolex ambitionne également d’obtenir des certifications environnementales pour ses bâtiments. En 2023, son site des Acacias à Genève a obtenu le label BREEAM In-Use, tandis que son futur complexe de Bulle, prévu pour 2029, vise la certification BREEAM Outstanding, qui ferait de lui le premier bâtiment industriel suisse de cette ampleur à obtenir une telle distinction.
Réduction des émissions carbone : un objectif clair pour 2030
Les ambitions de Rolex ne se limitent pas à une gestion plus durable des matériaux. La marque s’est fixée des objectifs précis de réduction de son empreinte carbone, en accord avec les engagements de l’Accord de Paris.
D’ici 2030, elle prévoit une diminution de 42 % de ses émissions sur les scopes 1 et 2 (émissions directes et consommation énergétique) et de 25 % sur le scope 3, qui représente 99 % de son empreinte totale. Pour y parvenir, la maison mise sur une transition énergétique massive, combinant :
- L’approvisionnement en or résiduel plutôt qu’en or minier, moins énergivore en termes d’extraction.
- L’optimisation des transports et de la mobilité, en limitant l’aviation privée au strict nécessaire.
- L’évolution des technologies de fabrication, avec des machines plus efficaces et des circuits courts entre production et matières premières.
- Le passage progressif à une électricité 100 % renouvelable sur l’ensemble de ses sites.
Le tout, sans tomber dans le piège des compensations carbone superficielles. Rolex a choisi de se concentrer sur la réduction effective de son impact, plutôt que d’acheter des crédits carbone pour compenser artificiellement ses émissions. Ce qui lui confère une responsabilité à l’image de son rôle moteur dans le secteur horloger.
Sensibiliser en interne, agir en externe
Un engagement durable ne peut être porté que s’il est partagé par l’ensemble des collaborateurs. C’est pourquoi Rolex a mis en place un programme de sensibilisation à la Fresque du Climat, un outil pédagogique basé sur les rapports du GIEC. En 2024, l’ensemble des cadres et membres de la direction ont suivi ces ateliers, ouverts également à tous les employés sur la base du volontariat.
Ce travail de sensibilisation s’accompagne d’un plan de formation élargi, couvrant les enjeux environnementaux, sociaux et de gouvernance. Car pour Rolex, l’horlogerie de demain ne pourra exister sans une prise de conscience collective et une mobilisation concrète de toutes ses équipes.
Une nouvelle ère pour Rolex et pour l’industrie horlogère
Avec ce premier rapport de durabilité accessible au public, Rolex envoie un signal fort : le temps du silence est révolu, place à l’action. Dans une industrie où la transparence a souvent été le grand absent des discussions sur l’environnement, la marque à la couronne fixe un nouveau standard, imposant des réductions d’émissions en valeurs absolues plutôt qu’en intensité.
Les enjeux environnementaux ne sont plus une simple tendance, mais une réalité avec laquelle les acteurs du luxe doivent composer. Et si Rolex prend la parole aujourd’hui, c’est pour démontrer que même les icônes intemporelles doivent savoir évoluer avec leur époque.
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