Passion Horlogère : Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur cette marque ? Pourquoi ce nom ?
Fabien Lamarche : Avant tout, il ne faut pas confondre Julien Coudray avec Julien Coudray 1518. Il n’est pas question ici de se revendiquer d’un horloger du passé, ni d’en copier les modèles. Le nom « Julien Coudray 1518 » vise à rappeler un événement fondateur de l’horlogerie : la commande par François 1er, le 31 Décembre 1518, de « deux mouvements portatifs insérés dans le pommeau de dagues ». C’est la première fois qu’on devait réduire un mouvement d’horlogerie et le rendre portable sur soi.
Nous ne voulons pas reprendre l’ADN de Julien Coudray, mais en reprendre la démarche. A cette époque, sans électricité, dans la poussière, avec une lumière réduite (nous sommes bien avant les fermes horlogères), l’horloger doit inventer des procédés, des outils, des savoir-faire inédits, dans le seul but de créer un objet beau, conforme aux exigences du noble.
Nous avons pour credo de faire perdurer cette méthode de travail. Nous sommes par exemple en train de plancher sur un modèle intégrant une phase de lune, et passons énormément de temps à trouver les pierres qui rendront possible son affichage de la façon la plus réaliste et la plus élégante possible.
FL : J’ai collaboré pendant plus de 20 ans avec de nombreuses maisons horlogères : Breguet en qualité de Responsable process, la Manufacture Roger Dubuis comme Chef de produits, L. Leroy dans le développement de modules et d ‘automates, puis Zénith où j’ai été responsable des méthodes et de l ‘industrialisation et responsable du Département mécanique et prototypes.
J’ai ensuite fondé un bureau de développement en 2007, RPMH. Nous avons par exemple travaillé avec Corum sur leur modèle T Bridge.
FL : J’ai toujours pour principe de commencer par apprendre un métier, puis d’essayer de le transmettre. Chez mes collaborateurs, je n’ai jamais cherché les diplômes, mais la passion, l’envie d’apprendre. Nous n’hésitons pas à nous appuyer sur des experts, dépositaires de savoir-faire en voie de disparition.
Julien Coudray 1518 peut être vu comme une académie : dans notre équipe de 50 personnes, tous doivent maîtriser plusieurs métiers de l’horlogerie, toujours dans une démarche d’apprentissage (NDLR : Fabien Lamarche maîtrise lui-même 39 des 44 métiers impliqués dans la création d’une montre).
Petit à petit, sur une durée de 5 ans, nous avons mis en place tous les métiers. Nous avons aujourd’hui la chance d’avoir au sein de la manufacture Julien Coudray 1518 tous les savoir-faire pour fabriquer intégralement une montre, ce qui nous donne une liberté sans pareil.
PH : Quels nouveaux modèles nous préparez-vous ?
FL : Julien Coudray 1518 est aujourd’hui vue comme une marque présentant des modèles classiques. Recréer un modèle 3 aiguilles est très difficile ; je pense que le pari est réussi pour la marque car nos modèles sont identifiables au premier coup d’œil.
Pour démontrer notre savoir-faire, nous travaillons sur plusieurs projets : un tourbillon, une phase de lune, un chronographe…
Nous profitons également de Belles Montres 2013 pour présenter un nouveau modèle : la Julien Coudray Sport. Celle-ci est réalisée en titane et or, ou totalement en titane, et est d’un aspect résolument sportif, en contraste avec nos modèles habillés. Le dessin de sa carrure s’inspire d’une calandre automobile. Elle s’adresse particulièrement aux possesseurs de véhicule d’exception : en effet, il sera possible de graver sur la masse oscillante, en émail grand feu, l’immatriculation personnalisée de son véhicule. Dans de nombreux pays (Suisse, Angleterre, Singapour), il est possible d’acquérir une plaque d’immatriculation personnalisée, et de nombreux clients ont vu cette possibilité avec un très grand intérêt.
FL : Belles Montres 2013 nous permet de présenter nos modèles existants, ainsi que notre nouveauté, la JC Sport. Il nous apparaissait toutefois essentiel de présenter aux visiteurs, au-delà des produits finis, des ateliers permettant de toucher du doigt le degré d ‘expertise et de minutie nécessaire à la création de leur montre de Haute Horlogerie. C ‘est également un moyen de placer nos horlogers au coeur du salon, pour revenir aux sources de la création horlogère.
FL : En regardant le marché horloger actuel, je constate que de très nombreuses complications (retour en vol, rattrapante, répétition) ne sont plus en phase avec les nouveaux usages de nos clients.
Les maisons horlogères ne cherchent pas à adapter les montres aux conditions de vie d’aujourd’hui, mettant à disposition un retour en vol inutile ou une fonction de réveil inutilisable au quotidien. Ce type de fonction est de toutes façons dévolu à d’autres supports, tels que les téléphones portables.
Au contraire de cette réutilisation de complications existantes, nous souhaitons réfléchir à de nouvelles complications, voire à leur détournement. Par exemple, il serait possible de détourner une fonction de réveil pour en transformer l’usage en compte à rebours. De la même manière, il serait plus utile d’avoir une fonction de répétition capable de sonner toutes les cinq minutes, fonctionnalité intéressante pour le décompte de toutes tâches répétitives.
Dernier exemple : dans le cadre du sport automobile, le chronographe est quasiment inutilisable. Il n’est pas possible par exemple de mesurer des prises de temps intermédiaires. Nous travaillons actuellement sur cette complication.
FL : Nous sommes extrêmement heureux lorsque qu’un de nos clients vient prendre possession de sa montre dans nos locaux, nous lui faisons visiter nos ateliers, rencontrer ceux qui ont fabriqué sa montre personnalisée, nous partageons ensemble un moment privilégié.
Mon rêve serait de marcher dans les pas de Julien Coudray, et me positionner en tant qu’artisan au service de mes clients. Nous encourageons énormément nos clients à aller vers le sur-mesure, en les accompagnant sur les choix de boîtiers, matières, cadrans… De la même manière, le client reste informé et consulté tout au long du process de fabrication de sa montre.
Nous souhaitons que notre client ne soit pas qu’un consommateur, mais le commanditaire de sa montre. Nous nous mettons à son service, et au service de son goût du beau…
Pour Passion Horlogère, récit Frédéric D., photographies Jacques-Olivier & Laurent A.
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