Thierry Gasquez – Quelles ont été les difficultés rencontrées pour la création de votre marque et de vos montres ?
Alexandre Meerson – En tout premier lieu la solitude des premières années quand je n’avais encore rien d’autre à montrer que mon intention. Cela a duré jusqu’à la création de mon équipe et la présentation de mon premier modèle. Puis il y eut la difficulté d’être en France. Quand en France on vous donne toutes les bonnes raisons de ne pas vous lancer, en Angleterre on vous donne toutes celles de le faire. C’est pour cela que je suis fier de dire que ma marque est britannique.
Mais créer la « supply chain » a été le plus difficile. Il aura fallu trois ans. Faire le tour des artisans, se choisir mutuellement alors qu’ils travaillent avec les plus grands, aura demandé de grands moments de persuasion. Vaucher nous garantit la montre, ce qui est un grande satisfaction pour la pérennité de nos produits et qui tend à rassurer nos clients. C’est une grande force quand on connait le sérieux de cette manufacture de mouvements.
Les artisans ont été associés au développement. En fait le projet leur a plu et ils se sont engagés à mes côtés.
La marque a été créée et lancée le 5 novembre 2014 à Londres, et tous les artisans ayant participé à sa création ont été invités. Le lendemain nous étions à QP, et là, énorme surprise, nous avons vendu tout le stock prévu jusqu’en mars 2015. Heureusement que nous avions anticipé sur le stock des mois suivants. Aujourd’hui la marque se trouve en Angleterre dans notre showroom, en France au Bon Marché, et à Amsterdam.
Nous allons ouvrir aussi à New-York, en plein coeur de Manhattan, et peut-être viendra Florence en 2016. En 2014, une cinquantaine de pièces ont été produites. L’objectif pour 2015 est 200 pièces en production et une centaine de ventes.
TG – Quelles sont aujourd’hui vos collections ?
AM – La première qui se divise en deux lignes avec l’Altitude et l’Officier, et la D15 qui sera une montre à double fuseau horaire (dite « GMT »).
TG – Quelle est votre clientèle ?
AM – Je pense à une clientèle avisée. La dame qui s’achète un Hermès Kelly personnalisé ou un monsieur qui s’achète des Berluti. J’essaie de développer en horlogerie ce qu’en couture on appelle une « silhouette ». Il existe une silhouette « Celine », une silhouette « Chanel », j’aimerais qu’un jour en horlogerie il existe une silhouette Meerson.
TG – Quel est le diamètre de vos montres ?
AM – 37mm pour la collection dédiée aux femmes qui va arriver en 2016, et 41 mm pour la Première. La D15 a un diamètre particulier. Elle fait 44 mm mais se porte comme un 42 mm du fait de son style.
TG – Quel est votre positionnement tarifaire ?
AM – Cela commence à 6 800 € TTC et cela va jusqu’à 22 000 € TTC. La D15 ira jusqu’à 18 000€, mais les commandes spéciales en or atteindront 50 000€.
TG – Etes vous collectionneur ?
AM – Cela fait sept ans que je mobilise tous mes moyens pour la création de ma marque. Mais j’ai quand même quelques montres que j’aime beaucoup. Jaeger-LeCoultre, Patek Philippe, Grand Seiko, Vacheron Constantin… sont des marques et des montres que j’aime beaucoup et que je possède.
TG – Quelle serait la montre qui vous ferait rêver ou que vous auriez aimé créer ?
AM – Quand je vais à Genève, je vais au musée Patek Philippe. Au 2e étage se trouve une montre qui est un berceau rectangulaire dont je ne connais pas la référence mais qui est d’une perfection absolue et que j’aurais beaucoup aimé créer.
TG – Quel est votre objectif ?
AM – Je veux créer le luxe d’aujourd’hui qui deviendra le classique de demain. Je rêve du classique réinventé. C’est quelque chose qui ne crie pas « je suis riche ou j’ai de l’argent », mais qui murmure « j’ai du goût ». C’est pour cela que j’admire la culture « Zen » japonaise car on enlève jusqu’à trouver l’essence même du produit. Une des raisons pour lesquelles je suis admiratif des montres Grand Seiko qui existent à travers le produit et non à travers un marketing agressif.
… En fait, quand vous me demandiez ce qui est le plus dur, c’est aussi parfois la solitude du créateur. Mon travail le plus difficile et le plus intense est de trouver l’équilibre, trouver la finesse, simplifier et savoir s’arrêter.
TG – Auriez vous un message à adresser à nos lecteurs ?
AM – Rencontrons-nous, j’ai envie de vous connaître et de savoir ce que vous pensez de mes montres.
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