Essai d ‘une AIRMAN CHRONO 08
Passion Horlogère a été reçue par Monsieur Damien Koch le 10 avril 2012 pour une interview exclusive.
Mais avant de retrouver l’interview, lors de notre rencontre à Bâle cette année avec Stephan Lack, Président de Glycine, il m’avait posé la question suivante : «A votre avis, écrit-on la ou le Glycine ? »
Voilà bien une question que je ne m’étais jamais posée et à laquelle je ne savais pas répondre. Aussi, ai-je effectué des recherches et voilà la réponse. “Glycine est un mot féminin, on dit de la Glycine car c’est une plante grimpante dont le nom scientifique est « Wisteria », en hommage à l’anatomiste américain Caspar Wistar (1761-1818) “.
Mais, « La Glycine » est surtout le nom de la Maison où les premiers garde-temps furent réalisés sous l’impulsion de son fondateur Eugène Meylan. C’est encore, le symbole de «tendresse» et «d’amitié» que le peintre Monet immortalisera sur ses toiles en peignant les fleurs de la plante.
Enfin pour les chinois, la glycine (la plante) a la réputation de «guérir, soigner et protéger» son propriétaire comme les habitants de sa maison. Voilà des «cieux cléments» pour envisager une présence de la marque dans ce pays.
Passion Horlogère : Bonjour Damien Koch, merci de nous recevoir et de nous accorder cette interview exclusive, vous qui êtes désormais membre actif de l’association Passion Horlogère.
A ceux qui ne vous connaissent pas, pouvez-vous vous présenter et nous préciser les origines de votre passion horlogère ?
Damien KOCH : J’ai un parcours professionnel atypique et ma passion de l’horlogerie a débuté très tôt. En effet, le mari de ma nounou assurait le SAV de la marque Jaeger-LeCoultre à Toulouse, ville où je suis né il y a bientôt 40 ans. J’étais très admiratif de ce Monsieur qui ne m’a jamais adressé la parole tant il était réservé. Il m’a tout de même offert un réveil. Un réveil à l’ancienne, totalement mécanique, avec deux cloches métalliques sur lesquelles une tige venait frapper pour produire le son strident du réveil. Mon plus grand plaisir était de le remonter et de le faire sonner à longueur de journée. Les habitants de l’immeuble devaient me détester ! Cette passion de l’horlogerie ne m’a plus quittée, au point de collectionner les montres, puis de monter un atelier de rénovation/restauration de montres anciennes. Les choses se sont enchaînées ensuite en cultivant les relations avec des professionnels en France et en Suisse.
La marque Glycine est présente dans 42 pays dont la France.
PH : L’arrivée de Stephan Lack en mai 2011 à la Présidence de la société insuffle-t-elle une nouvelle dynamique pour la marque sur le marché français ?
DK : On peut dire que c’est un virage pour la marque Glycine sur le plan marketing. Il y a un patrimoine créatif important dans cette marque. Il est trop peu connu et l’objectif de la famille Lack est de s’appuyer sur les lignes directrices cultivées par Eugène Meylan puis de la famille Brechbühler. Sur le plan commercial, Glycine a toujours eu des difficultés à réellement se faire connaître car certains marchés sont difficiles à conquérir. Pourtant, sans présence dans certains pays, l’ensemble de la distribution reste limitée car l’image d’une marque passe par la présence dans certaines zones géographiques. Je pense particulièrement à l’Asie, qui malgré ses spécificités, permet d’acquérir une notoriété sur une population dont la mobilité et le pouvoir d’achat ne cessent de croître. Je fais confiance à Stephan Lack, au travers de son expérience significative de la distribution de grandes marques en Asie pour mettre en place sa stratégie avec efficacité.
Le modèle phare de la marque est l’ « Airman », une montre militaire présentée pour la première fois en 1953.
PH : Dans quelles circonstances a été commercialisé ce modèle devenu mythique depuis ?
DK : La gamme Airman arrive en 1953 pour la première fois avec la « Airman 1953 » que l’on peut voir dans le superbe livre d’André Stikkers (un passionné de la marque Glycine qui a réalisé un travail extraordinaire dans son livre édité par Glycine autour des modèles Airman de 1953 à nos jours). Cet ouvrage accompagne toute montre Airman achetée. On retrouve des images de pilotes américains aux commandes de F104 puis de Phantom à l’apparition des montres Airman. Toute l’histoire de la gamme y est retracée. C’est vraiment au moment de la « deuxième guerre du Vietnam », lorsque les américains déploient en Avril puis Novembre 1965 le 476 ème Tactical Fighter Squadron et participent à l’opération Rolling Thunder que les montres Glycine sont probablement plus utilisées par les pilotes américains. À cette époque, la montre est un véritable outil indispensable pour les pilotes. Le chasseur F104 est particulièrement mis à l’honneur chez Glycine avec un modèle dédié qui reprend le design des cadrans de bord de l’avion de chasse. Depuis cette époque, la gamme Airman a été développée et dans les années 60, la SST (pour « Super Sonic Transport ») a fait son apparition avec les débuts des vols super soniques civils à visée commerciale. C’est la fameuse « Pumpkin » avec son boitier coussin, qui est revisitée à plusieurs reprises et dernièrement avec une nouveauté de Bâle 2012 et la sortie en mai 2012 de la Airman SST 12 qui reprend les codes de la Pumpkin pour un des trois cadrans proposés par Glycine. Toutes les montres Airman ont la spécificité d’être soit GMT (avec 3 fuseaux horaires) et sont aussi à chaque fois proposée dans une version « puriste » qui est une montre à affichage 24H avec deux fuseaux horaires.
La gamme du modèle « Airman » se décline aujourd’hui en trois familles la « GMT », la « Purist » et la « GA »
PH : Quelles sont les différences majeures sous ces trois appellations ?
DK : La GMT est une montre qui possède une aiguille 24H avec laquelle on va pouvoir faire un réglage de fuseaux horaire de l’heure UTC. Très pratique pour les pilotes qui doivent remplir des papiers et savoir par exemple si on est en -1 ou -2 par rapport à l’heure locale française, ou bien en -5 ou -6 en arrivant à New-York, etc. Du fait des index spécifiques à cette aiguille GMT et de la lunette tournante, on peut régler deux fuseaux horaires rien qu’avec cette aiguille. Avec les aiguilles classiques des heures et des minutes, on a coutume de lire l’heure locale en 12H. La version dite puriste ne possède pas l’aguille supplémentaire GMT. C’est aussi une montre 100% 24H. Donc les aiguilles des heures et minutes n’effectuent une révolution de cadran qu’une fois par jour. L’absence de cette aiguille GMT ne permet d’avoir que deux fuseaux horaires. Attention, sur ces montres, lorsque l’aiguille des heures est à 6H il est en fait midi ! C’est un peu déroutant quand on n’a pas l’habitude ou lorsqu’on alterne entre les montres classiques 12H et une Airman « purist ». La version GA est sans doute la plus orientée pilote. On la retrouve sur la Airman Base 22, la Airman 17, la Airman 18 essentiellement. On a en fait une montre puriste (les aiguilles principales sont sur 24H et elles servent à avoir l’heure GMT et l’heure locale) avec une aiguille supplémentaire qui, elle, tourne sur 12H. C’est un peu plus complexe mais très utile
Vous nous avez apporté différentes versions de la gamme « Airman », le chronographe SST, la Airman 18, la Base 22 et le chronographe 08. Dont ce dernier modèle fera l’objet d’un essai prochainement par un membre de Passion-Horlogère.
PH : Laquelle a votre préférence et pourquoi ?
DK : Sincèrement je les apprécie toutes depuis des années et sans exception, à chaque fois pour des raisons différentes. La Airman Base 22 que je porte aujourd’hui est un compromis idéal entre les fonctionnalités que j’aime retrouver sur une montre, tant sur le design militaire et aéronautique, que sur les fonctionnalités liées à ces environnements. En plus, son diamètre et l’épaisseur de son boîtier me permettent de la porter aussi bien avec un costume qu’avec des vêtements plus décontractés. C’est une montre qui s’adapte à toutes les circonstances. Ensuite, j’ai un vrai coup de cœur pour la Chrono 08 parce que c’est une montre qui ose le 46mm de diamètre, qui dépasse 1,5cm d’épaisseur et pourtant, avec ces dimensions, elle s’intègre superbement à mon poignet de 19cm. En vol, de nuit comme de jour, c’est une montre très lisible, sport et qu’on ne rencontrera jamais facilement au poignet de quelqu’un d’autre dans la rue puisque c’est une série limitée à 500 exemplaires. La Airman 18 est une montre que j’aurai pu porter il y a une dizaine d’année. Son diamètre 38 mm m’attendri quand je la regarde, mais elle est trop petite pour que je la porte aujourd’hui. J’adore voir ce modèle au poignet d’une dame ! La Airman 17 est une montre de mec si vous me passez l’expression ! C’est une montre sans concession sur ses formes et son mécanisme. Un fameux Valgrange, que personnellement, sur le plan horloger, j’adore pour sa robustesse et ses dimensions généreuses. Enfin, avec l’arrivée des nouveaux modèles de SST 12, j’ai un véritable second souffle sur le coup de cœur dans les montres dont la boite est de forme coussin. Cela me replonge dans le design à succès des montres des années 60/70.
Passion Horlogère a reçu de l’importateur français de la marque Glycine, une montre à l ‘essai de la célèbre gamme « Airman » avec sa dernière version, la « Chrono 08 » référencé 3876 19 LB9.
Esthétique et finition
Premières impressions très favorables pour ce chronographe très équilibré, viril par ses dimensions généreuses (46mm de diamètre) et dont l’affichage sur le cadran indique sa destination professionnelle comme un instrument de bord indispensable en back-up pour le pilote, lors d’une navigation aérienne. D’ailleurs, ne dit-on pas, à raison dans le milieu aéronautique, qu’il n’y a pas de « bons pilotes » mais de vieux pilotes ? D’où l’importance d’avoir au poignet un garde-temps fiable.
L’heureux possesseur d’un des modèles sera flatté de savoir qu’il est réalisé par la marque Glycine en seulement 500 exemplaires. Le boîtier est en acier inoxydable et les poussoirs du chronographe comme les couronnes du remontoir et de la lunette intérieure sont vissés afin de garantir au garde-temps, une étanchéité à 200 mètres (20 ATM).
Le modèle reçu en prêt vient avec un bracelet de cuir noir en veau avec surpiqûres blanches (autre option, un bracelet caoutchouc). Le bracelet épouse bien la continuité des entre-cornes et rend l’ensemble harmonieux à son poignet. Le fond de boite permet par un verre saphir de découvrir un mouvement ETA 7754 dont la masse oscillante signée « Glycine – Airman » et représentant l’avant stylisé d’un « Bücker Jungmeister » est en plaqué or 18K. L’ensemble est très fluide, agréable dès le premier coup d’œil et d’une très belle finition.
Confort et prise en main
Première surprise en la mettant au poignet, son poids qui affiche sur la balance ses 150 grammes. Ceci est compensé par un affichage sur le cadran d’une très grande lisibilité de jour comme de nuit. Les trois fuseaux horaires sont bien distincts et aucune confusion n’est possible. Le premier s’affiche par deux aiguilles (heure et minute), le second fuseau est obtenu par une troisième aiguille GMT de couleur rouge. Le dernier fuseau horaire se lit sur une lunette intérieure tournante en périphérie du cadran (placée sous le verre saphir). Un tachymètre gradué jusqu’à 400 km/heure se trouve au-dessus des index.
De nuit, l’affichage est obtenu grâce aux propriétés du « Super Luminova » et qui est du plus bel effet. Sa lisibilité n’est pas altérée par le nombre d’informations communiquées par la montre.
Pourquoi trois indications de l’heure, pourrait-on se demander ?
La mise à l’heure et le réglage des deux fuseaux horaires (sur 24 heures) supplémentaires sont intuitifs et nul besoin de se référer à la documentation proposée par la marque. Les boutons poussoirs se dévissent afin d’accéder au réglage des fuseaux horaires. Une fois revissés les poussoirs sont bloqués afin de ne pas risquer de modifier les réglages effectués.
Rappelons qu’en aéronautique, le premier fuseau horaire est calé en rapport avec son lieu de
départ. Le second fuseau, sur l’heure UTC (Universal Time Coordinated) ou temps universel. Par exemple, en été, l’heure légale en France est en avance de deux heures sur l’heure UTC et en hiver de seulement une heure.
Le modèle « Airman chrono 08 » permet de régler un troisième fuseau horaire, celui du lieu de destination de l’avion qui peut-être différent de son aérodrome de départ.
Le chronographe se déclenche également en ayant pris soin préalablement de dévisser les poussoirs qui restent inopérants une fois revissés. La fonction « Fly-back » est absente des fonctionnalités proposées ce qui est dommage car cela est très utile en aéronautique pour calculer une durée intermédiaire à la verticale de deux points en visuel sur le sol et inscrits sur le plan de vol. C’est mon second regret à propos de ce garde-temps.
Sur le cadran, 3 compteurs disposés à 6, 9 et 12 heures complètent efficacement l’affichage de
la mesure du temps respectivement en heures, secondes et minutes. La date est lisible à 3 heures. Enfin, la réserve de marche de près de deux jours (46 heures) ajoute au plaisir de porter ce garde-temps mécanique à remontage automatique.
Fiche technique du calibre
Le mouvement est le calibre Valjoux 7754 de la manufacture Suisse ETA que l’on retrouve également sur le modèle « Airman 9 » dès 2003. Glycine sera la première marque Suisse à utiliser ce mouvement. Ce que l’on sait moins, c’est qu’il est sur une base d’un 7750 dessiné par un horloger de talent, Edmont Capt en 1973 à la demande d’Ebauche SA et en réponse à la sortie en 1969 du mouvement « El Primero ».
Le mouvement (30mm de diamètre) est un chronographe à cames qui bat à 28 800 alternances et est équipé d’une aiguille GMT centrale (différence avec le mouvement 7750). Les ponts sont sertis de 25 rubis et fixés par des visses bleuies. La raquetterie est du plus bel effet avec son porte-piton signé ETACHRON. Mon dernier regret, les ponts sont peu mis en valeur et un travail de sa surface façon « cote de Genève » eut ajouté au plaisir de voir le mouvement par son verre saphir.
En synthèse
La nouvelle collection proposée par la Maison Glycine avec son modèle « Chrono 08 » est bien la digne héritière de la série prestigieuse de la légendaire « Airman » dont il reprend l’esprit de son design et enrichit les fonctionnalités initiales à destination des pilotes et autres globe-trotters.
Proposé à un prix de 4 800 CHF (environ 4 000 euros), ce modèle robuste et fiable est édité en série limitée. Il saura être apprécié également des hommes d’affaires car ce modèle peut se porter également sous un costume.
Nos remerciements sincères à Damien Koch pour l’essai de cette montre bracelet.
Auteur : Georges Langeais / Crédit photos et vidéo : Laurent Andreani – Pour Passion Horlogère
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