Bart et Tim Grönefeld, les Frères Horlogers, viennent de présenter à Baselworld 2016 leur nouveau modèle, tout frais sorti de leur atelier d’Oldenzaal aux Pays-Bas. Après un Parallax Tourbillon récompensé au Grand Prix de Genève en 2014, la 1941 Remontoire va-t-elle à son tour faire tourner les têtes ?
Spécialistes reconnus des répétitions minutes, grandes sonneries et tourbillons qu’ils ont pratiqués au plus haut niveau chez Renaud et Papi dans les années 1990, Tim et Bart excellent également dans la mise en valeur ou la résurrection de complications horlogères oubliées ou peu connues. Ce fut particulièrement le cas avec la seconde morte magnifiée dans leur modèle One Hertz et que plusieurs manufactures parmi les plus réputées ont depuis interprétée à leur façon.
Les deux frères mettent cette fois à l’honneur dans leur nouvelle montre le principe du remontoir d’égalité qui a déjà connu de belles réussites comme chez François-Paul Journe ou plus récemment au cœur de la Sauterelle d’Andreas Strehler.
Sans vouloir faire ici un exposé technique et historique de ce dispositif, rappelons-en juste le principe général. Comme l’énergie fournie par le ressort de barillet au mécanisme de la montre varie au cours du temps essentiellement en fonction de sa tension résiduelle, on en utilise une partie pour remonter sur une période courte et de manière toujours égale un ressort auxiliaire. Celui-ci peut alors rythmer à échéances régulières et à force constante le cadencement du train de rouages. D’où l’appellation de remontoir d’égalité de cette complication.
La contrepartie de l’emprunt d’énergie au ressort-maître pour remonter le ressort auxiliaire est une diminution de la réserve de marche. Il faut par ailleurs veiller à limiter les à-coups sur le mécanisme lors de la libération périodique du dispositif.
Paradoxalement, ce n’est pas tant pour une recherche de précision accrue que le remontoir d’égalité a été le plus utilisé jusqu’à présent dans l’histoire de l’horlogerie mais surtout dans le fonctionnement particulier des horloges de clocher au XIXe siècle. Celles-ci étant actionnées par un système de poids et non par un ressort moteur, l’utilisation d’un ressort auxiliaire assurait un remontage secondaire qui permettait de libérer régulièrement la force nécessaire à l’avancement saccadé des aiguilles des heures et des minutes sur le cadran extérieur, souvent surélevé par rapport à la plateforme principale de l’horloge et exposé aux intempéries.
C’est justement l’une de ces horloges de clocher qui a en partie inspiré Bart et Tim lorsqu’ils ont démarré la conception de leur nouveau modèle. Une horloge qu’ils connaissent particulièrement bien puisque c’est celle de la basilique romane Saint-Plechelmus à Oldenzaal dont la famille Grönefeld assure l’entretien en voisin de père en fils depuis l’installation de ce magnifique mécanisme à carillon dans le clocher en 1913. Après Johan le grand-père, c’est Sjef le père qui a pris le relais et en a très tôt transmis la passion à ses deux fils… ainsi déjà qu’à ses petits-enfants !
Sur l’horloge monumentale, le dispositif de remontoir fait avancer et sauter la grande aiguille des minutes toutes les 30 secondes, ce qui a par exemple pour effet d’empêcher en hiver la formation de glace qui viendrait en bloquer le mouvement. Bien évidemment, ce n’est pas dans cet objectif que Tim et Bart ont adapté cette complication à leur nouvelle montre-bracelet, mais avec la volonté de la mettre en valeur pour le plaisir des connaisseurs en la développant à leur façon.
C’est ainsi que le tout nouveau calibre G-05 délivre une fréquence de 21 600 alternances/heure tout en bénéficiant d’un système d’amorçage/détente du ressort auxiliaire de remontoir selon un cycle de huit secondes au moyen d’une ancre de transfert à trois palettes combinée à une came à cinq lobes. Le relâchement du train de rouage rythme ainsi l’avancement de la roue et donc de l’aiguille des minutes à cette même cadence de huit secondes.
Afin de limiter les perturbations dues aux à-coups, cette activation brutale est en partie absorbée et amortie en faisant tourner une petite hélice de dissipation que l’on retrouve côté cadran à 9h à travers un petit guichet. Compte tenu de l’énergie nécessaire à l’ensemble, la réserve de marche n’est que de 36 heures. Une solution à double barillet aurait été possible pour l’étendre mais aurait été au détriment de la distribution des éléments dans le mouvement. En revanche, il est possible de visualiser que l’on arrive en fin de réserve lorsque l’hélice commence à donner des signes de ralentissement.
La Grönefeld 1941 Remontoire est donc une montre ludique dont l’on prend plaisir à découvrir et comprendre le fonctionnement intime. Une montre hommage également à Sjef le gardien de l’horloge d’Oldenzaal dont 1941 est l’année de naissance (après le 1912 de la One Hertz en hommage au grand-père Johan). Une montre d’amitié enfin puisqu’elle est réalisée en partenariat avec l’atelier Renaud et Papi et avec celui d’Andreas Strehler pour certains composants liés en particulier au remontoir lui-même.
Mais c’est d’abord une très belle montre d’horloger au sens de la qualité de conception, des matériaux utilisés et des finitions. Le nouveau boîtier de 39,5 mm de diamètre est travaillé tout en lignes courbes jusqu’aux cornes allégées et fixées de l’intérieur par deux vis en titane afin de pouvoir être démontées et repolies sans dommage.
Le cadran en argent est sablé, les index sont facettés et les aiguilles sont bleuies au feu et polies. Les alternances de traitements de surfaces et les différences de niveaux par exemple sur le cadran de petite seconde ajoutent au cachet visuel de l’ensemble. Les dimensions contenues associées au rubis qui couronne le pivot de l’hélice en façade peuvent également contribuer à séduire les dames.
D’autant que l’épaisseur du boîtier n’est que de 10,5 mm. En comparaison des deux précédents modèles des frères Grönefeld (la One Hertz et le Parallax Tourbillon), la Remontoire est la moins imposante des trois comme on peut s’en rendre compte ici.
Et pourtant, la splendeur et la complication du mouvement sautent aux yeux lorsque l’on découvre l’agencement des composants au verso. On y retrouve avec plaisir les ponts en acier en forme de toit de maison hollandaise et la grande ouverture sur le mécanisme que nous avions déjà appréciés sur la One Hertz. Mais un soin particulier a de plus été apporté à la découpe des bras des roues en laiton doré. Et la boîte de remontoir dissimule même un double roulement à billes miniaturisé. Sans parler des finitions qui alternent anglage, sablage, polissage ou microbillage…
Compte tenu du temps nécessaire pour réaliser et parfaire ce modèle, le nombre qui en sera produit est limité à 188, chaque exemplaire étant numéroté. Toutes les combinaisons seront possibles dans un choix de deux boîtiers et trois cadrans :
– Boîtier en or gris à haute teneur en palladium (donc non rhodié et non altérable dans le temps) ou boîtier en or rose.
– Cadran argent, cadran saumon ou cadran orange et noir.
Vous trouverez bien sûr tous les détails techniques sur ce modèle Remontoire 1941 sur le site des frères Grönefeld et prochainement sur la page qui leur est dédiée chez EKSO Watches Gallery.
Pour Passion Horlogère : Rédaction Luc J. / Photographies Michel H.
Laisser un commentaire