
Un design, mais pas uniquement…
L’automobile a souvent inspiré l’horlogerie. L’inverse est plus rare, même si je me suis laissé dire qu’il fallait jeter un œil attentif au bouton de l’autoradio de la nouvelle 208. Le responsable du design intérieur chez PSA étant un féru d’horlogerie, surtout japonaise. Y aurait-il chez PSA une sensibilité supérieure à la chose horlogère que chez les autres constructeurs ? Je ne sais pas si la question est légitime, mais toujours est-il que j’ai au moins 2 exemples à mettre au crédit de cette théorie.
En effet, Alexandre Meyer, le co-fondateur de la marque Phenomen a exercé son talent au sein du département de Design prospectif du groupe français, en tant que concept designer. Le design prospectif, c’est le all inclusive du design, le no limit, le » dare to draw what you dream », en résumé, l’industrialisation n’entre pas en ligne de compte, seule compte la beauté de la forme, la pureté du trait, dans le respect de l’ADN de la marque.

Ceci explique sans doute le dessin un peu disruptif de l’Axiom. Mais dans le cadre du développement d’une nouvelle marque horlogère, le design n’est rien, s’il n’est pas accompagné d’un moteur d’exception. C’est là qu’entre en scène Sylvain Nourisson, le motoriste de Phenomen, le Mozart du calibre, le De Vinci du balancier spiral. Ayant fourbi ses armes chez Christophe Claret, puis La Joux-Perret, avant d’intégrer le géant japonais Citizen (qui possède Arnold & Sons, faut-il le rappeler, qui est notamment motorisé par des calibres issus des ateliers … La Joux-Perret), il est le co-fondateur de Phenomen, son directeur technique et opérationnel, et le père du calibre PH-010, le mouvement in-house de la marque.
Quand vous réunissez un designer à la créativité débridée et un motoriste hors norme, il ne peut en résulter qu’un objet horloger à forte personnalité offrant des solutions innovantes et des performances de très haut niveau.
C’est ce que j’ai eu l’occasion de vérifier en m’entretenant avec Alexandre Meyer, et en passant tour à tour à mon poignet les différentes versions de l’Axiom, et notamment les nouvelles déclinaisons Hybrid Carbon, lors de leurs présentations chez Nous Paris en ce matin pluvieux d’automne.
Axiom – Dimensions contenues, pour un contenu tridimensionnel
Première très bonne surprise, la montre est plutôt compacte, et se positionne parfaitement sur le poignet. Les photos que j’avais eu l’occasion de découvrir me laissait craindre le pire quand à l’encombrement de cette concept watch comme aiment à la nommer ses créateurs. D’autant que les 2 couronnes positionnées à 12h semblaient bien proéminentes, mais il n’en est rien. Ensuite, les finitions, et les alternances de traitement sur la boite en titane usinée dans la masse sont absolument sublimes. Last but not least, l’énorme pare-brise, qui offre à la vue le balancier à inertie variable et les 2 amphithéâtres coniques, est aussi spectaculaire qu’élégant.
L’affichage de l’heure se fait au moyen d’aiguilles 3D, qui sortent de l’intérieur du mouvement pour venir balayer les indications d’heures et de minutes. Rétrogrades évidemment, l’aiguille de l’heure est en plus sautante, pour une précision et une évidence de lecture imparables. Cette mécanique nécessite un double embrayage, double aussi les barillets, pour une autonomie de plus de 100h, voire plutôt même 120 me confiera Alexandre. Le remontage manuel n’interviendra ainsi que tous les 4 jours et demi, une opération facilitée grâce à l’excellente préhension des couronnes.
De cette filiation automobile assumée, est née le concept même de l’Axiom. Offrir une version moderne de la driver’s watch. Ces montres qui permettent de lire l’heure sans avoir à lâcher la main du volant, ni avoir à détourner le regard de la route. D’autres s’y sont essayé avec des fortunes diverses, tels Parmigiani Fleurier avec ses modèles Bugatti Super Sport par exemple ou MB&F avec l’Horological Machine N°5 ou la HMX. Voila des références qui placent d’emblée Phenomen dans la cour des grands !
Axiom – Une modernité revendiquée
Mais justement, ces références, auxquelles on pourrait évidemment rajouter Urwerk en sont-elles vraiment ? Alexandre me confiera qu’elles sont flatteuses, mais également un peu réductrices. A trop vouloir comparer et mettre les marques dans des cases, on en dénie leur vraie personnalité et l’énorme travail qui a mené à la naissance de l’Axiom. D’autant que le calibre PH-010, dont on peut voir le côté pile à travers le fond saphir, est une mécanique d’exception conçue et assemblée dans la petite manufacture basée à Besançon. 267 composants, double barillet, porte-échappement indépendant, balancier à inertie variable, la marque n’a pas reculé devant le défi, et s’est offert le calibre qu’elle avait rêvé.
Heureusement, une fois en main, et au poignet, la magie opère et on prend conscience du défi que ce sont lancé les 2 co-fondateurs. Défi qui reste à ce jour toujours d’actualité d’ailleurs. Même si l’Axiom est connue et reconnue par ses pairs, la vitesse de pointe n’est pas encore atteinte en terme de volume de vente. La faute à une stratégie de diffusion très confidentielle. Mais le tir est en passe d’être corrigé. Et Phenomen de plancher déjà sur un 2ème modèle dont on devrait avoir des nouvelles mi-2020.
D’ici là, ce sont donc maintenant 4 déclinaisons qui s’offrent à l’amateur d’objet horloger rare. Outre les déclinaisons titane, et titane full black que nous connaissions déjà, limitées à 60 pièces chacune, sont venues s’ajouter 2 déclinaisons hybrides carbone/titane et carbone/or rose. Encore plus exclusives, puisque limitées à 40 exemplaires, ces 2 versions ont en commun un fond boite et une « baie de pare-brise » en carbone forgé, tandis que la carrure de la boite est soit en titane, soit en or rose en fonction de la version choisie. D’une finition irréprochable, ces combinaisons apportent une touche plus sportive encore à un modèle qui se veut résolument moderne, et jeu de contraste et de matière absolument superbe. Mention spéciale me concernant à la version or rose, qui tranche évidemment plus avec le carbone, et qui apporte une chaleur qui manque un peu aux autres versions.
C’est peut-être pour cette raison, afin d’offrir plus de choix de personnalisations et d’apporter un peu de peps à cette magnifique création que Phenomen s’est associé au fabriquant de bracelets sur mesure français Jean Rousseau. Caoutchoucs, cuirs, dans de nombreuses couleurs et finitions permettront aux amateurs qui veulent pousser le concept jusqu’au bout d’associer un bracelet vif et tranché, pour une présence au poignet définitivement assumée. Le modèle titane que portait Alexandre Meyer, monté sur un caoutchouc jaune doublé cuir en est d’ailleurs un parfait exemple.
Français, et fiers de l’être
« Unexpected french design », design français inattendu clame la marque. Et c’est vrai que ce n’est pas de ce côté de la frontière qu’on se serait attendu à voir naître une marque comme Phenomen. Mais ça fait extrêmement plaisir de constater que l’horlogerie française est en plein renouveau, et ce dans quasiment toutes les gammes de prix. Entre Lip, Yema, Bell & Ross, Reservoir, Pequignet et j’en passe, la France n’à pas à rougir de son industrie horlogère. Et quand certains ont tendance à ne pas assumer leurs origines, d’autres les revendiquent, les assument et en font une force. La fierté est une qualité. Surtout quand elle est justifiée. Alors longue vie à Phenomen. Et vive la France !
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