Les Russes ont cette tradition d’avoir la force mentale de repartir de zéro. Et ceci sans faire table rase du passé. L’expérience du passé est une force dont ils savent se servir, mais pour autant ils ne font jamais preuve de nostalgie. Le pragmatisme l’emporte ! Il était ainsi décidé, dés l’année dernière, que 2020 serait la nouvelle année zéro de la marque. Et malgré le contexte mondial et tous ses imprévus, cette idée de « jour d’après » et d’année zéro n’a fait que se renforcer.
Zéro, un symbole de recommencement
Les équipes Raketa n’ont pas imaginé une création d’une nouvelle montre pour symboliser ce nouveau départ. Elles ont puisé dans leur catalogue, dans leur histoire, et dans celle de la Russie pour chercher l’inspiration et rendre leur copie.
Il y avait dans le catalogue de la marque cette montre très célèbre, la « Big Zéro ». Elle tient son nom du fait qu’un grand Zéro se situe à midi et constitue le point de départ de la révolution des aiguilles. Ce qui va à l’encontre des conventions horlogères établies, mais qui est on ne peut plus pragmatique. Il y a bien que dans l’horlogerie que l’on commence par la fin et non par le début.
Il est vrai aussi qu’en occident le zéro a une connotation péjorative. Zéro, c’est « rien », c’est la plus mauvaise note, c’est le seuil du négatif, et c’est le début des températures redoutées. Ce qui n’est pas le cas pour les Russes, qui voient en lui un début, un point de départ.
Il y a cette fameuse anecdote que nous livre Raketa et qui illustre à merveille ce propos :
« Lors d’un sommet politique international en Italie, il a été demandé à Gorbatchev d’expliquer ce que signifiait «Perestroïka». Il a simplement montré sa montre Raketa Big Zero et a déclaré : “C’est comme sur ma montre : le peuple russe veut tout recommencer à zéro”. Cette phrase a immédiatement fait les titres des journaux italiens. Ainsi a commencé la légende du «Big Zero» ! »
Et puis dans l’histoire de l’art, il existe aussi une anecdote à propos du zéro avec Kasimir Malevitch. Lors de son exposition de 39 œuvres à la galerie Dobychina en 1915, se trouve en hauteur et dans un angle de la pièce une œuvre sensée incarner un rôle spirituel. En effet, c’est à cet endroit que les familles paysannes Russes exposent les icônes religieuses.
Kasimir Malevitch explique cette place pour son « Carré noir sur fond blanc » comme étant une provocation futuriste à l’égard du bon goût, des normes sociales et des conventions artistiques. « Cela représente un Grand Zéro » dit il. Il dira aussi :
« Tous les phénomènes sont réduits à un grand zéro ».
Kasimir Malevitch
Ainsi l’avant-gardisme de Malevitch, ce mouvement artistique russe est proche de la culture de Raketa. Et il tutoie aussi l’histoire de la Russie.
Une synthèse historique
La montre que propose Raketa est une synthèse de l’histoire de la Russie, de celle de la Manufacture, et des influences de la culture artistique et contemporaine Russe.
Son cadran réalisé en véritables pierres taillées est un clin d’œil au métier originel de la Manufacture Impériale de Peterhof. Le motif ainsi créé est un rappel du tableau le plus célèbre de l’art abstrait qui a marqué le début de l’Art Contemporain. Et l’utilisation de la Big Zéro pour servir d’écrin à ce message de nouveau départ pour la marque Raketa dresse un pont entre la grande Histoire de la Russie et la petite histoire de la marque.
Une montre à passer au poignet
Malgré tout ce que cela peut représenter, la montre qui nous est donnée d’observer est avant tout un garde-temps. Certes, il n’est pas ordinaire, mais il offre cette fonction de donner l’heure. C’est pour cette raison que nous avons tout de même envie d’en parler « es qualité ».
Ses spécificités techniques ont été présentées à l’occasion d’une précédente publication. Nous passerons donc rapidement sur toute forme de description factuelle. Ce qui intéresse notre propos ce sont plutôt les sensations qu’elle procure. Vous le découvrirez en détail dans la vidéo réalisée à l’occasion de la découverte du modèle en notre possession.
La toute première impression a été très positive. Les magnifiques photos que la marque a proposées à la presse mondiale rendent parfaitement honneur à la qualité artistique de la montre. Mais elles ne permettent pas d’apprécier certains éléments déterminants de l’esthétique, du confort et de l’utilisation d’une montre.
C’est ainsi que les réserves que nous pouvions avoir quant à l’esthétique du boîtier ont été balayées par sa parfaite réalisation. Il nous était apparu que cet habillage d’une montre au cadran si exceptionnel était une faiblesse pour l’ensemble. Mais c’était avant de la passer au poignet. Ce boîtier, même s’il n’est pas le plus finement réalisé de l’horlogerie de luxe, n’en est pas moins d’un confort plutôt rare. Son dessin et sa réalisation qui peuvent sembler assez simples ont pour résultat une ergonomie extraordinaire.
Le prolongement de la courbe du boîtier par le bracelet en cuir dont la souplesse est bluffante donne une impression plus que positive dés le premier porté. Ce qui n’arrive jamais habituellement… ou peut-être extrêmement rarement. Il s’agir de la deuxième montre Raketa que nous testons, et cela fait deux fois que nous avons cette impression dés le premier porté.
Lors de l’annonce du lancement de cette montre, nous avions relevé à plusieurs reprises, sur les réseaux sociaux, des questions à propos de la lisibilité du cadran. Il est évident que les aiguilles noires sur la partie centrale noire du cadran n’offrent aucun contraste pour une lecture aisée de l’heure. C’était voulu et assumé par la marque. Pourtant… pourtant les aiguillent se voient parfaitement bien à l’usage. Le jade noir absorbant toute la lumière permet aux aiguilles d’apparaître en effet 3D. Et nous vous assurons qu’elles se distinguent bien mieux que certaines aiguilles métalliques sur des cadrans noirs, blancs, ou de couleurs conventionnelles.
Le confort et la lisibilité de la montre sont bien présents. Mais ce qui nous a le plus charmé, c’est sa beauté. Jusqu’à présent elle fait l’unanimité des personnes à qui nous l’avons présentée. Sa beauté est la première chose exprimée par qui la voit. Le cadran y est pour beaucoup, bien entendu. Même si la beauté d’une montre est le résultat de tout un ensemble. Mais ce cadran est un appel à l’observation. Il se découvre petit à petit avec toute la singularité que peut avoir chaque morceau de cette mosaïque de pierres fines. On y découvre des détails uniques selon l’heure de la journée et selon la lumière qui vient s’y réfléchir ou s’y engouffrer selon la couleur concernée. C’est un pur bonheur que de s’équiper d’une loupe d’horloger et de le scruter.
Zéro, conclusion
On ne peut conclure cet essai après quelques jours seulement de porté de cette montre au poignet. On ne peut que livrer quelques premières impressions comme nous l’avons fait supra. Il n’en demeure pas moins que pour le moment cette montre est un bluff. La marque a songé à un coup de poker en n’hésitant pas à affirmer que la majorité des personnes ne l’aimerait pas. Nous vous affirmons de notre côté qu’elle est bluffante. Ses qualités se situent là où on ne les attend pas. Cette montre surprend nos habitudes « trop horlogères » pour nous rappeler que l’efficacité se situe souvent dans la simplicité. Et puis les horlogers Russes ont mis les bouchées doubles sur les originalités de la montre. Ils n’ont pas choisi la facilité avec ce cadran en pierres. Et ils ont même recherché les difficultés en les voulant véritables et taillées. Cela sous-entend des contraintes, des risques de casse, et une fragilité de manipulation au moment de la conception et de l’assemblage. Mais une fois sur votre poignet, ce cadran devient magique. Il n’est pas plus fragile que n’importe quel autre des montres de votre collection.
Alors plutôt que de conclure, nous souhaiterions donner un top départ. Ceci sous forme de conseil aux lecteurs nous ayant lu jusqu’à la fin de cet article. Si vous l’avez fait, c’est que le sujet et le produit vous intéressent. Nous vous conseillons alors de toute urgence d’essayer cette montre. Il existe quelques détaillants en France qui la proposent. Elle vaut l’essai. Ensuite la magie opérera ou pas. Ce n’est plus notre sujet. Nous sommes là dans le domaine de l’intime. Mais laisse-vous tenter, vous risquez la bonne surprise !
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