Pour concevoir et fabriquer cette montre à partir d’un fragment de métal provenant de la coque d’un submersible, la manufacture horlogère russe a travaillé en collaboration avec son ancien commandant.
Le premier commandant du Leopard 24
Valery Dyakonov est un homme heureux. À 63 ans, cet ancien officier supérieur de la marine russe vit une retraite paisible dans la superbe ville de Saint-Pétersbourg. Sans doute ses promenades sur le port lui rappellent-elles ses années passées en mer. Notamment celles qui le virent assurer le commandement d’un sous-marin nucléaire d’attaque de type Akula. Le nom de ce bâtiment de plus de 100 m de long, capable de s’enfoncer à 500 m sous la surface, résumait parfaitement l’esprit dans lequel il avait été conçu : Leopard.
Depuis le jour où Valery Dyakonov a posé définitivement son sac à terre, le submersible portant le matricule K-328 a repris ses missions furtives. Ceci, dans un silence de fonctionnement faisant de lui l’un des plus efficaces au monde en ce domaine. L’histoire ne dit pas comment l’aventure a commencé. Mais toujours est-il que lors de récents travaux de modernisation du sous-marin dans un chantier naval, certains éléments métalliques de sa coque ont été prélevés puis remis officiellement à la manufacture horlogère Raketa. Rappelons au passage que cette marque (dont le nom signifie fusée en russe) a été lancée en 1961 pour célébrer l’exploit de Gagarine, premier homme à avoir volé dans l’espace. Mais son origine est beaucoup plus ancienne puisqu’elle est l’héritière directe de la manufacture impériale de Peterhof, fondée en 1721 à Saint-Pétersbourg sur décision du Tsar Pierre le Grand. Jusqu’en 1991, Raketa domina l’horlogerie soviétique avant de sombrer au moment de la dissolution de l’URSS. Depuis 2011, elle est dirigée par David Henderson-Stewart, un Franco-Néo-Zélandais d’ascendance russe qui, avec passion, a décidé de lui rendre tout son lustre.
Raketa, alchimiste du temps
Aujourd’hui, d’étonnantes montres sortent des ateliers où l’on cultive au plus haut point la notion d’artisanat horloger. Un lieu hors du temps où s’exprime une véritable créativité, autant esthétique que technique.
Cette Maison ayant lancé il y a peu une montre dont les aiguilles tournent à l’envers (la Russian Code), on n’est pas surpris de découvrir qu’elle a choisi de métamorphoser les fragments récupérés sur le sous-marin Leopard en lunettes de montres ! Précisons que le volume d’alliage récupéré (dont la composition reste confidentielle, secret-défense oblige) a permis de donner naissance à une série limitée de 300 exemplaires.
Une fois les morceaux de métal issus de la coque du Leopard parvenus chez Raketa, le commandant Valery Dyakonov s’est impliqué au côté de l’équipe dans les différentes étapes de conception et de développement de la future montre. Car au-delà de cette greffe de matériaux, l’objectif de David Henderson-Stewart était de concevoir un véritable instrument horloger de sous-marinier.
Une “Submariner” Russe
La première décision a été d’opter pour un affichage 24 heures permettant de distinguer les heures du jour et de la nuit. Une fonction appréciable lorsque l’on passe plusieurs semaines en immersion, coupé de la lumière extérieure et des repères temporels habituels. Autre facteur favorisant la lisibilité, les aiguilles et les chiffres sont recouverts d’une substance luminescente garantissant de pouvoir lire l’heure même dans la pénombre d’un poste de pilotage. De plus, trois lignes rouges divisent le cadran en six secteurs de quatre heures chacun. Les sous-mariniers peuvent ainsi suivre l’avancée des quarts durant lesquels ils sont de service. L’immobilité étant fréquente à bord d’un submersible, le mouvement automatique conçu et réalisé par Raketa est équipé d’une masse oscillante bidirectionnelle. Celle-ci double l’efficacité du remontage du mécanisme et assure une réserve de marche de 40 heures.
Si la composition exacte de l’alliage constituant la lunette reste donc secrète, on sait en revanche que le boîtier de 44 mm de diamètre est réalisé en acier inoxydable, avec une étanchéité assurée jusqu’à 200 m.
Authentique et éternelle
Dans le domaine esthétique, on remarque la forme des aiguilles qui s’inspirent des instruments de bord d’un sous-marin. De plus, les couleurs de la montre sont identiques à celles de la coque du submersible et cultivent le contraste entre le noir et le rouge.
Chaque exemplaire de cette série limitée sera livré avec un certificat d’authenticité confirmant l’origine du métal, un insigne commémoratif portant le symbole du sous-marin Leopard, un bracelet complémentaire en silicone et un outil pour en assurer l’interchangeabilité. De quoi réjouir le commandant Dyakonov : « Pour la première fois depuis de longues années, je touche mon sous-marin Leopard. Et maintenant il restera avec moi pour toujours », a-t-il lancé en passant la montre à son poignet.
Faut-il comprendre qu’il ne reste plus que 299 montres disponibles ? Probablement…
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Peter Mogg pour Passion Horlogère
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