Pierre angulaire de la fameuse Classic Car Week qui attire dans la péninsule de Monterey des centaines de voitures fabuleuses et des milliers d’amateurs et connaisseurs de l’automobile, les quatre jours de la Rolex Monterey Motorsports Reunion représentent l’occasion annuelle idéale de voir s’affronter sur piste, roue dans roue, des bolides historiques à l’énorme pedigree, répartis en dix-sept catégories de types et d’époques (depuis les voitures de compétition d’avant 1940 jusqu’aux Stock Cars de années 1990 en passant par toutes les périodes marquantes).
La Shelby Cobra, déferlement de puissance brute sous une robe fine et élégante, est l’un des plus grands héritages sportifs de l’Histoire. Le samedi 18 août, une extraordinaire grille de départ réunira quarante-cinq Shelby Cobra CSX 2000 et 3000 rigoureusement authentiques qui s’affronteront sur les 2,238 miles (3,6 km) de l’exigeant Mazda Raceway de Laguna Seca. Des milliers de spectateurs, les yeux écarquillés, vibreront devant ces incroyables Cobra venues du Royaume-Uni, de Suisse, du Canada et bien sûr des États-Unis, qui lutteront à couteaux tirés dans les onze virages, les trois cents pieds de dénivelé et le fameux « Corkscrew » (tire-bouchon) de Laguna Seca dès le drapeau vert qui sera agité par nul autre qu’Edsel Ford II, arrière-petit-fils d’Henry Ford.
La Rolex Monterey Motorsports Reunion rassemblera également deux des six prodigieux coupés Cobra Daytona construits par Shelby American au début des années 1960. L’une courra le samedi et l’autre fera partie de l’exposition spéciale Shelby Cobra Heritage Display.
Persévérance
En 1963, Carroll Shelby prit l’ambitieuse décision de s’attaquer à Ferrari avec son coupé Cobra Daytona. Il fallut tout le talent du designer de Shelby American, Peter Brock (qui sera présent à la Rolex Monterey Motorsports Reunion) et la persévérance, pour ne pas dire l’acharnement, de l’équipe, pour qu’Enzo Ferrari finisse par plier. Dan Gurney et Bob Bondurant (qui sera lui aussi présent) remportèrent la catégorie GT des 24 Heures du Mans de la plus belle manière en 1964, dominant outrageusement les GT et luttant aux coude à coude avec les Prototypes. Le team remporta plusieurs victoires la même année et aurait été sacré Champion du Monde des Constructeurs si le Commendatore Enzo Ferrari n’avait pas usé d’une manœuvre pour le moins déloyale, parvenant à convaincre les organisateurs de l’épreuve de Monza de l’annuler, privant de ce fait la Cobra Daytona des points qui lui manquaient pour remporter le championnat. L’année suivante, la Scuderia Ferrari, consciente de ses faiblesses, évita la catégorie GT et la Cobra Daytona Coupé remporta huit épreuves sur dix, ramenant le trophée du Championnat du Monde des Constructeurs FIA 1965 aux États-Unis.
« À Daytona en 1964, nous avons humilié les Ferrari, » se rappelle Peter Brock. « Malheureusement, un incendie dans les stands nous a empêché de terminer la course. L’épreuve suivante, c’étaient les 12 Heures de Sebring et là, nous avons atomisé tout le monde et remporté la manche. Puis nous avons amené la voiture au Mans où nous avons eu le record du tour. Idem à Spa mais la voiture, qui s’était montrée d’emblée ultrarapide, souffrait encore de problèmes de jeunesse. »
Passion pour le passé
L’un des clous de la Rolex Monterey Motorsports Reunion, l’exposition Shelby Cobra Heritage Display, retracera cinquante ans de gloire sportive avec les Cobra les plus significatives, y compris la toute première Cobra Daytona Coupé, seul exemplaire assemblé aux États-Unis. Cette Cobra Daytona Coupé 1964 présente un intérêt particulier, comme l’explique son propriétaire passionné, le collectionneur Fred Simeone, âme du Simeone Automotive Museum de Philadelphie : « Le facteur numéro un, bien entendu, est le fait que la Daytona est Championne du Monde des Constructeurs. Ensuite, il y a ses deux victoires consécutives, à Sebring et à Spa, et toutes ses victoires durant ses deux ans de compétition. Ensuite, devenue retraitée, ma voiture a eu l’occasion de rouler sur le lac salé de Bonneville avec Goodyear qui avait loué le site pour effectuer des essais de pneumatiques en novembre 1965. Ils ont appelé Carroll Shelby qui leur a envoyé cette Cobra Daytona Coupé, laquelle, bien qu’auréolée de ses succès en 1964 et 1965, était tout de même dépassée par rapport aux nouvelle Ferrari à moteur arrière. Il se fait que Craig Breedlove était sur place et a bien voulu la piloter. Avec lui, la Cobra Daytona Coupé a établi vingt-trois records dont mon préféré, le record de vitesse moyenne sur douze heures, avec 150 miles à l’heure (251,4 km/h), ravitaillement du réservoir de 55 gallons compris (208 litres). »
Lynn Park, « Monsieur Cobra », a conservé quatorze des cinquante Cobra qui furent siennes depuis les années soixante. Il en pilotera une dans la course des Cobra et en confiera deux autres aux mains expertes de ses fils.
« Mon histoire avec les Cobra commence en 1962, date de ma première rencontre avec Carroll Shelby, » explique Lynn Park, également responsable de l’authenticité des Cobra qui disputeront cette course. « Il est étonnant de constater qu’à chaque apparition d’une nouvelle sportive, comme la Viper ou n’importe qu’elle autre, tout le monde retourne cinquante ans en arrière pour la comparer à une Cobra du début des années 1960. Depuis tout ce temps, la Cobra reste LE mètre étalon en matière de performances. »
Une autre chose est certaine : la Rolex Monterey Motorsports Reunion sera le théâtre de la plus grande évocation de Carroll Shelby l’année même de son décès. Outre la course des Cobra et l’exposition Shelby Cobra Heritage Display, d’autres célébrations ont été planifiées : un Cobra Car Show sur la ligne des stands (pour toutes les Cobra authentiques, de route et de course), un Cobra Car Corral réunissant des centaines de Cobra authentiques ou répliques, des tours de circuit en hommage à Carroll Shelby et un pique-nique Shelby Cobra incluant une séance de questions-réponses avec Peter Brock et Bob Bondurant, deux grands acteurs de l’histoire mouvementée de Shelby American.
Laisser un commentaire