Votre poignet devra être digne d’accueillir cette superbe pièce de 50mm de diamètre !
Un héritage difficile
Le vintage à bon dos. Et il l’a large aussi ! Pas une marque pour ne pas revendiquer une inspiration néo-rétro, une mode tirée du passé, ou une ancienne gloire d’un catalogue oublié. Qu’elle soit montre de plongée, de pilote automobile, ou d’homme du front, la montre moderne doit s’appuyer sur des victoires passées, puisque tout ou presque a déjà été conquis.
Certaines marques jouent difficilement la carte de l’héritage, quand d’autres sont légitimes à la sortir du jeu. Il en est de Breitling. Fondée par Léon Breitling en 1884 à Saint Imier, en Suisse, la marque a produit sans discontinuer des instruments techniques et précis, bien souvent en avance sur la concurrence, depuis cette date.
Le chronographe modèle 637 a servi d’inspiration pour cette Navitimer Super 8
Puisant sa légitimité dans le domaine aéronautique, pour lequel elle a fournit des instruments iconiques, le plus célèbre et incontournable étant la Navitimer, et sa règle à calcul intégrée, qui a propulsé Breitling à jamais au Panthéon horloger, la marque a présenté l’année dernière la Navitimer Super 8, que j’ai eu l’opportunité de tester.
Ce modèle massif qui impose sa présence, si l’on n’a pas les épaules pour l’assumer, n’est en pas moins superbe et envoûtant. Il tire pourtant inspiration d’une période noire de notre histoire, la seconde guerre mondiale. Les équipages des bombardiers n’avaient alors pas toute la technologie moderne qui permet aujourd’hui des frappes aussi chirurgicales que possibles. Ils devaient calculer, en tenant compte de l’altitude, de la vitesse, et du temps mis par les bombes à toucher le sol, le moment idéal de largage afin d’optimiser les frappes. Ils étaient bien aidés dans leur tâche par un chronographe à retour, le modèle 637 de Breitling. Le modèle 637 n’est pas une montre. C’est un instrument, un chronographe, qui ne sert qu’à chronométrer avec précision des durées. Il ne se portait d’ailleurs pas au poignet mais à la cuisse. Il est surdimensionné, et pourvu d’un poussoir et d’une couronne énorme, pouvant être aisément manipulé même en portant les gros gants en cuir et laine de mouton que les aviateurs portaient dans les années 40, les cockpits n’étant pas particulièrement bien pourvus en chauffage à l’époque. Le modèle 637 est équipé de cette lunette caractéristique, bidirectionnelle, non crantée, pourvue d’une pointe rouge bien visible, afin d’aider l’opérateur dans sa tâche.
Une personnalité assumée
La Navitimer Super 8 s’inspire donc de cet instrument, en en reprenant les codes stylistiques, et en dynamitant le conservatisme de bon ton dont Breitling à le secret. Notons cependant que le marché est tellement frileux, et tendu, que prendre des risques en présentant de vraies nouveautés est d’une audace telle que plus personne ne s’y risque. Même Audemars Piguet a du faire face à de sérieuses critiques lors de la présentation de sa toute nouvelle collection Code 11.59, c’est dire ! Alors dire que cette Super 8 apporte un petit vent de fraîcheur dans la gamme est un euphémisme.
Bon évacuons tout de suite le sujet. Avec cette lunette si marquée portant le diamètre de la montre à 50mm (46mm le diamètre du boitier), ce modèle ne s’adresse de toute façon pas à tous les poignets. Et son design clivant ne laissera pas indifférent. On aime, ou pas. Je suis de ceux qui aiment. Et mon poignet me permettant de porter des montres de cette taille, j’ai pris énormément de plaisir à arborer cette Super 8. D’autant que le modèle d’essai que la boutique Breitling de la rue de la Paix m’a mis à disposition est la version titane, qui est d’une légèreté que sa taille ne permet pas de soupçonner.
Cette Super 8 se porte sur un bracelet Nato en cuir brun, fermé par une boucle ardillon gravée du nom de la marque. Il se marie parfaitement avec la montre, et offre le double avantage d’un confort de porté indéniable, et de surélever la boite de la surface du poignet. Ainsi, la couronne surdimensionnée située à droite ne vient pas blesser le dos de la main, pour les amateurs d’horlogerie qui portent, comme moi, leur montre très bas sur le poignet. Notons que les boucles du Nato ainsi que la boucle ardillon ont tendance à se rayer facilement, mais ça donne du cachet à la montre !
Le design de la boite passe au second plan sur ce modèle, tant la lunette monopolise l’attention. Ronde, elle est équipée de cornes massives, chanfreinées, qui inspirent une sensation de solidité et de robustesse. Impression confirmée par une finition entièrement brossée. On n’a pas affaire à une montre de luxe, mais à un robuste garde-temps qui saura vous accompagner dans toutes vos aventures ! Heureusement, Breitling n’a pas cédé à la mode des fonds saphir. A la place, le fond titane est gravé « Breitiling 8 », faisant ainsi référence au département Huit Aviation. Ce département avait pour mission la conception, et la fabrication d’instruments à usage aéronautiques, d’une autonomie de 8 jours, et capables de supporter les pires environnements. Ils devaient passer avec succès une batterie de tests de résistance aux chocs, aux vibrations, aux températures et aux champs magnétiques avant d’être déclarés bon pour le service. C’est de ce département qu’est sorti le modèle 637. CQFD.
Le fond plein gravé du logo « Super 8 » évoque le département Huit Aviation de la marque.
Un cadran envoûtant
Si le fond avait été saphir, on y aurait vu un excellent mouvement, mais un peu perdu dans cette grande boite, le calibre manufacture B20. Il s’agit ni plus ni moins que du calibre Tudor MT5612, qui équipe notamment la Pelagos, de la marque à la rose. Un calibre moderne et performant, automatique, équipé d’un rotor sur roulement à billes bidirectionnel, offrant 70h de réserve de marche et certifié COSC.
Le cadran soleillé est de toute beauté !
Il n’a pas fort à faire dans la Super 8, puisque qu’il n’a que 3 aiguilles à mouvoir, aussi longues soient-elles. En effet, pas de date sur ce modèle, et tant mieux. Le superbe cadran vert kaki soleillé ne s’en trouve ainsi pas dénaturé. Le cadran, c’est finalement la pièce maîtresse de ce modèle, du moins sur la version titane qui nous intéresse ici. La lunette attire l’œil et l’attention, et le cadran les retient. Passant du noir au doré, paraissant laqué par moment, mais étant délicatement et superbement soleillé, on ne se lasse pas de l’admirer. Cerclé d’une fine graduation, marqué de 5 en 5 minutes, il offre par ailleurs au regard des chiffres arabes surdimensionnés, recouverts de Super Luminova beige du plus bel effet. Beige que l’on retrouve sur les aiguilles des heures et des minutes, luminescentes également, ce qui n’est pas le cas de la trotteuse au design caractéristique. Le « B » de Breitling, coupé de ses ailes, doré, est appliqué, ce qui apporte une petite touche de luxe bienvenue, et se marie à merveille avec le vert.
La fameuse lunette, bidirectionnelle, en titane, reprend le triangle rouge, évoqué supra, dans une version un petit peu plus discrète. Aisément manipulable, elle pourra toujours être utile pour mesurer des temps courts, dont la précision peut se permettre de prêter le flanc à la critique, comme la cuisson des asperges, ou votre bain de bouche. Elle ceint un verre saphir, bombé, traité anti-reflet sur les 2 faces, pour ne rien louper du spectacle, quelles que soient les conditions de lumière.
Proposée à 5250€, on pourra toujours tiquer sur le prix demandé. Et puis de poser les arguments sur la table et de s’en rendre compte qu’un modèle entièrement en titane, équipé d’un mouvement manufacture certifié COSC, à la personnalité certaine, et à la présence indéniable à ce tarif, c’est finalement parfaitement cohérent. Et entre nous, cette Navitimer Super 8, on l’aime ou on la déteste.
Moi, je l’aime.
Richard Ségault pour Passion Horlogère
Merci à la boutique Breitling de la rue de la Paix pour la mise à disposition de ce modèle, pour la disponibilité, et l’excellence de son équipe.
Soundtrack : Klink Clock – Accidents
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