Le procès touche à sa fin. Et comme le veut la règle, le dernier mot est à la défense. Les avocats des prévenus se succèdent à la barre, mais, souvenons-nous, un d’entre eux se défend seul. Ou plutôt, il avait, avant le procès, récusé ses deux avocats. Il s’agit de Julien V. Ce dernier avait fait part au Tribunal, lors de sa comparution, de sa volonté de garder le silence et de son refus d’être défendu. De plus, il est absent à cette audience du 19 mars, ayant prétexté une rage de dents et souhaitant rester en cellule.
Pour connaître les réquisitions du Parquet
Nous vous livrons donc, dans ce dixième récit au sujet du Procès de Paris pour des actes de contrefaçons de montres de luxe, la plaidoirie de la seule avocate de Florian R. poursuivi pour ses actions au sein de La Geneverie, son « épicerie du crime » (vente de consultations de fichiers, de faux papiers, et de montres de contrefaçon). Maître Marie Violleau représente Florian R. et voici quelques morceaux choisis de sa plaidoirie.
« 3 millions par les douanes, 6 millions par les Parties Civiles, et 150 000 € par le Parquet. Voici ce qui est demandé à Florian R. Ce dossier est insupportable, et les audiences étaient pénibles. Qu’est ce que ça vaut comme peine ? Au Tribunal on a l’habitude des délinquants, des escrocs, mais lui là (désignant son client – NDLR) je suis incapable de dire le quantum de peines au début du procès. On a 5 consultations de fichiers Police, 300 montres, 21 fois où il a fait l’intermédiaire entre celui qui fait de faux papiers et celui qui en veut. Si on suit les réquisitions du Parquet, Julien V. sort demain. Il a fait quoi de moins grave que Florian R. ? Est-ce qu’il est dangereux Florian R. ? »
« Sur la Bande Organisée, cette histoire de système solaire (Cf. réquisitions du Parquet – NDLR) ne tient pas une seconde. Les réquisitions du Ministère Public sont bonnes jusqu’au Quantum de peines. Mais Monsieur Florian R. est impréparable. Il a compris tout seul qu’il disait n’importe quoi, et c’est tant mieux. Il a menti, mais il a compris. Et quand il donne l’information de l’argent caché, il démontre son honnêteté. Ceux qui achetaient sur son site ne sont pas les mêmes qui peuvent acheter de vraies Rolex, Audemars Piguet, ou Richard Mille. Avec l’impossibilité d’acheter des montres de luxe du fait de leur système de listes et d’attente interminable, ces marques favorisent le phénomène de la contrefaçon. Et ça leur fait presque de la pub ! Mais toutes ces marques vont bien. Monsieur Florian R. ne leur a fait aucun préjudice. Et Julien V. a été honnête quand il a dit que Florian R. n’était qu’un revendeur. Ils ne se connaissent pas, donc il n’y a pas de Bande Organisée ! »
« La Bande Organisée on aurait pu la coller à Julien V. si on avait enquêté sur les usines en Chine. Et on a même parlé de travail d’enfants… Mais ça ne tient pas une seconde avec cette photo de jeune fille qui portait une robe jaune de Princesse. Elle n’est pas à genoux à bosser comme un pauvre enfant exploité. On doit aussi écarter les slogans des douanes qui ne riment à rien. En fait vous êtes libres de décider de ce que vous voulez (s’adressant au Tribunal – NDLR). Sur 14 infractions, si on enlève la Bande Organisée, il n’en reste plus que 3. Vous n’êtes pas l’arbitre de la propriété intellectuelle. Et ce n’est qu’un trouble au droit des marques. »
« Pour les faux papiers, la question est de savoir à quoi sert Florian R. J’aurais aimé qu’on ait une enquête plus approfondie. Le faussaire n’avait pas besoin de Florian R. Sur 5 000 faux papiers produits on en reproche 21 à Florian R. La Genèverie c’est 1 350 abonnés sur Telegram, et il est seul à la gérer. En fait il est une anecdote dans ce dossier. Il faut donc continuer les investigations et arrêter de se concentrer sur quelqu’un d’aussi minable. Sur les 5 consultations du Fichier des Personnes Recherchées (FPR – NDLR), a-t-il facilité des cavales ? A-t-il entravé des enquêtes ? Non, je ne crois pas ! Les grands voyous ne passent pas par Florian R. »
« En fait ce n’est pas un gros dossier. C’est un dossier pénible, comme un cailloux dans une chaussure. Et, force est de constater que la prison et la comparution, ça a fonctionné. Le quotidien de Florian R. est celui d’un homme qui n’a pas d’amis, à part ceux qu’il rencontre sur internet. Depuis son enfance il a été trimballé. Mais il n’est pas dangereux. La période de sûreté ce n’est pas pour lui. Comment on peut requérir cela contre lui et pas contre Julien V. ? Il n’y a pas eu d’enrichissement. L’argent qu’il a gagné a été saisi. Il a déclaré qu’il avait des comptes au Maroc, mais c’est pas vrai. Il a cru que tout ça était un jeu. »
« En sortant il veut travailler dans l’entreprise de son beau-père, puis il veut bosser dans les montres. Dans sa chambre il vérifiait avec sa presse si les montres étaient étanches. Il avait ses petits outils et des composants pour pratiquer l’horlogerie. Il aime ça, c’est sa passion ! Il a fait des efforts en détention, il a fait des efforts devant la juridiction, aussi, je demande de revoir les réquisitions à la baisse et de ne pas suivre les montants des amendes. »
Après cette plaidoirie de Maître Marie Violleau, qui était la dernière du procès, tous les prévenus ont été invités successivement à la barre pour une dernière déclaration. Depuis son box des accusés, en raison de sa comparution non-libre, Florian R. a déclaré : « Je suis sincèrement désolé, et je souhaite sortir rapidement de détention. »
Le verdict est mis en délibéré et fera l’objet d’un dernier article sur Passion Horlogère.
Laisser un commentaire