Au coeur d’un mouvement horloger, l’échappement joue un rôle central dans la mesure du temps, et si les montres mécaniques font « tic-tac » c’est grâce à lui. Constitué de composants minuscules, ce dispositif représente un véritable défi de microtechnique.
« Tic » : une dent de la roue d’échappement s’arrête net contre l’une des palettes de l’ancre. Puis, dégagée par le balayage circulaire de l’oscillateur – ce couple stratégique formé par le balancier et le spiral –, l’ancre laisse « échapper » la roue, qui reprend sa course pour venir buter net contre la seconde palette de l’ancre : « tac ». Une fraction de seconde seulement s’est écoulée entre ce « tic » et ce « tac », si caractéristiques des montres mécaniques. Rythmée par les oscillations du balancier-spiral, l’ancre poursuit à l’infini son mouvement alternatif contre les dents de la roue d’échappement à raison de 28 800 alternances par heure – 14 400 « tics » et autant de « tacs ».
Interaction avec l’oscillateur
Par son fonctionnement, en interaction avec l’oscillateur, l’échappement fait office de « clé du temps » dans le mouvement : il reçoit et régule l’énergie brute du ressort de barillet, puis la transmet par impulsions à l’oscillateur qui, lui, détermine la division du temps. Sans échappement, le ressort de barillet libérerait toute son énergie en se déroulant d’un coup. Sans échappement pour entretenir ses oscillations, le balancier-spiral perdrait rapidement son élan et le calibre s’arrêterait au bout de quelques minutes.
Emblématique de l’art horloger, objet de très nombreuses recherches depuis des siècles, l’échappement fait partie, avec l’oscillateur notamment, des éléments dont dépendent le plus la précision, la fiabilité et l’autonomie de marche d’un mouvement de montre. Il est aussi de ceux dont la fabrication est la plus complexe et la plus délicate. Les tolérances de production et de fonctionnement sont de l’ordre de quelques microns seulement, et certains composants, tels la cheville de plateau, le dard ou les palettes de l’ancre, comptent parmi les plus petits de la montre.
Le secret de la qualité Rolex
Rolex a développé son propre outillage, ses propres machines et ses propres méthodes de fabrication, de contrôle et d’assemblage pour la réalisation de ses échappements sur le site de la Manufacture des Montres Rolex S.A., à Bienne. Dans les ateliers de ce site de production, le niveau de qualité est tel que le délicat travail de retouche, ou « achevage », habituellement nécessaire pour garantir un fonctionnement optimal de l’échappement, est réduit au minimum. Presque un « miracle » lorsque l’on sait que le bon fonctionnement du système d’échappement repose sur de nombreux paramètres, en particulier l’interaction précise des palettes de l’ancre avec les dents de la roue d’échappement, qui se joue à une petite dizaine de microns près : moins de 0,01 millimètre de trop ou trop peu, et le mécanisme s’arrête.
Les excellents résultats obtenus par la Manufacture ne sont pas un hasard : ils sont le fruit d’un savoir-faire horloger de pointe, d’une grande maîtrise technique et de rigoureuses méthodes de contrôle des tolérances qui permettent de produire en série des pièces d’une très grande précision. À titre d’exemple, sur 100% des mouvements Rolex, chacune des dents de la roue d’échappement est contrôlée et mesurée afin de vérifier le respect des tolérances, qui, très strictes, sont de l’ordre de quelques microns.
Roue, ancre, pont et plateau
Ce que l’on nomme « échappement » est en réalité un ensemble constitué de quatre composants : la roue d’échappement (ou roue d’ancre), l’ancre, le pont d’ancre – qui maintient cette dernière en place tout en limitant ses mouvements par des butées intégrées – et, enfin, le double plateau avec sa cheville en rubis, fixé sur l’axe de l’oscillateur. Travaillant comme une chaîne – depuis la roue d’échappement jusqu’au double plateau en passant par l’ancre –, cet ensemble de pièces subit de très importantes sollicitations mécaniques : pas loin de 700 000 chocs et frottements par jour entre l’ancre et la roue d’échappement, soit plus de 250 millions par année. Des éléments en rubis synthétique sont ainsi utilisés afin de minimiser les frottements contre le métal (palettes de l’ancre, cheville de plateau, pivots), et les surfaces de contact, entre autres les dents de la roue d’échappement, doivent être parfaitement lisses et polies.
Lubrifiants exclusifs
La lubrification est une étape indispensable et cruciale pour un fonctionnement optimal des différents éléments de l’échappement. Chacune des dents et les deux pivots de la roue d’échappement notamment doivent être lubrifiés avec une quantité d’huile précise. L’huile utilisée doit en outre rester performante lors des variations de température, et cela durant plusieurs années. À ces fins, Rolex a élaboré des procédés d’application et développé des lubrifiants exclusifs qui contribuent à améliorer la durée de vie de l’échappement et sa stabilité dans le temps. La fiabilité et les performances à long terme de la montre sont ainsi renforcées, et les entretiens peuvent donc être effectués à des intervalles plus espacés.
Echappement Chronergy exclusif
Afin d’augmenter encore le rendement de ses calibres, Rolex a développé et fait breveter une version améliorée de l’échappement à ancre suisse, le standard de la montre mécanique. Cet échappement optimisé, nommé Chronergy, est issu de recherches extrêmement poussées qui ont conduit à une nouvelle conception de l’ancre et de la roue d’échappement. Ces deux composants ont en effet été redessinés et sont en outre réalisés en nickel-phosphore, un alliage qui leur permet de résister aux champs magnétiques élevés. La roue d’échappement a de plus été ajourée, ce qui a allégé son poids et réduit son inertie. Grâce à la géométrie inédite des deux composants, le rendement de l’échappement, qui reste d’une fiabilité et d’une résistance optimales, est amélioré de 15 %.
L’échappement Chronergy compte parmi les innovations majeures que Rolex a apportées à ses mouvements. Les calibres 3235 et 3255, présentés par la marque en 2015, ont été les premiers à inclure cette innovation, suivis par le calibre 3285, dévoilé en 2018. Le calibre 3230, lancé en 2020, bénéfice lui aussi de cet échappement. Dévoilés en 2023, les mouvements optimisés du Cosmograph Daytona et de la Sky-Dweller, à savoir le calibre 4131 et le calibre 9002 – qui remplacent respectivement les calibres 4130 et 9001 –, et le calibre 7140 du modèle 1908 de la collection Perpetual disposent également l’échappement Chronergy.
Merci pour cet article très bien documenté.